Présentation du projet de Langouët

Présentation du projet de Langouët

Langouët (35)

Accompagnement de logements sociaux en autoconstruction. Installation en 2010.

NB : il ne s’agit pas à proprement parler d’un projet d’habitat participatif

http://www.compagnonsbatisseurs.org/index.php?lg=fr&id=315

 

Présenté par Jacques Matelot, des Compagnons bâtisseurs de Bretagne, qui accompagne la promotion et l’autoconstruction du projet, lors de l’atelier n°6 de E²=HP² : “Coûts et économies de l’autoconstruction dans l’habitat participatif”, le 10 avril 2015, à Landerneau

 

Les Compagnons bâtisseurs assurent l’accompagnement dans des projets collectifs d’autoconstruction et d’autorénovation. Le projet de Langouët, centre-bourg en Bretagne, est un des gros dossiers du moment. Il s’agit de la construction de 10 logements, dans le cadre d’un lotissement communal, dans un programme qui compte aussi 25 lots libres, et 6 locatifs sociaux. « L’objectif, c’est une posture offensive sur l’autoconstruction, c’est-à-dire qu’on veut qu’on veut participer au sujet de recourir à l’autoconstruction pour faire accéder des personnes

à la propriété. Ce n’est pas qu’on soit pour la propriété à tout prix, ce n’est pas ça, mais c’est pouvoir faire accéder des personnes à la propriété alors que sans autoconstruction elles ne peuvent pas accéder du tout. »

 

« Aujourd’hui, de plus en plus d’habitants se sont lancés dans l’acquisition de réhabilitation de logements parce qu’ils ne peuvent pas acheter neuf. Les logements les moins chers sont ceux où il y a le plus de travaux. Mais il y en a plein qui n’y arrivent pas, pour plein de raisons diverses et variées, notamment parce qu’ils n’ont pas les compétences nécessaires. Et je peux vous dire que ces personnes-là peuvent descendre très très bas. Nous, on travaille pour aider ces personnes à réhabiliter leur logement, à trouver des solutions. »

 

« L’effet levier c’est pour les habitants, c’est la solvabilité du projet d’accession. Le coût moyen du logement du projet, c’est 135 000€ pour des maisons individuelles T4 de 85m2, terrain compris, TTC, en VEFA, tout compris. Le même bailleur vend entre 1900 et 2000€ le mètre carré. La démarche qu’on veut développer, c’est de faire 70 à 75 % d’autoconstruction, ce qui est beaucoup. Comme on propose ça à des personnes qui n’auraient pas pu accéder du tout, ou alors dans des conditions très risquées, en fait ce n’est pas un marché qu’on prend au marché du bâtiment, c’est un marché en plus. Ça, c’est le deal. Parce que derrière on a essayé d’embarquer aussi des collectivités et des partenaires qui sont très sensibles, et à juste titre, à la problématique économique du secteur du bâtiment. Ça veut dire qu’on réserve à des personnes qui financièrement ne pourraient pas s’en passer. »

 

L’une des missions des Compagnons bâtisseurs est d’assurer les sécurisations. Il s’agit d’une part de l’accompagnement technique sur le chantier, ainsi que la planification, la logistique, les médiations. Il s’agit aussi des rescrits juridiques : « on a été pendant deux trois ans écrire des rescrits avec les services fiscaux et services sociaux de manière à avoir des autorisations de non fiscalisation, parce aujourd’hui l’État peut être amené à fiscaliser et à appliquer la TVA aux échanges entre les habitants collectivement qui font de l’autoconstruction entre eux, en monétisant cet échange, et leur appliquant 20 % de TVA. Nous avons eu des rescrits de services fiscaux de Bretagne qui bloquent ça, et qui permettent de reconnaître l’entraide civile,

10concrètement. L’idée, quand on dit sécuriser, c’est pour les habitants, mais c’est aussi pour la suite. Ça nous a pris un certains nombre de temps, et d’argent, d’ailleurs. »

 

« On parle de techniques d’autoconstruction, mais il y a un lien entre le financier et le technique, c’est-à-dire que le fait d’avoir une décennale permet d’avoir une dommage-ouvrage, et ça permet qu’une banque accepte de financer, notamment pour des primo-accédants qui n’ont pas 30 ou 40 % d’apports. Quand vous avez peu d’apports, ce que regarde la banque c’est le risque, c’est logique, c’est légitime. Quand vous avez peu d’apports et qu’en plus vous ne pouvez pas dire que vous pouvez construire, et que ce que vous allez construire c’est assuré, on ferme. À Langouët, la décennale est portée par le maître d’ouvrage, donc Néotoa. Ce qui veut dire que quand on va revendre aux habitants, ils auront exactement les mêmes garanties qu’une entreprise, avec une décennale, une dommage-ouvrage, même si c’est eux qui ont assuré une grosse partie des travaux. Et face aux banques, à la limite, les autoconstructeurs aujourd’hui pourraient presque ne pas parler d’autoconstruction : ils disent qu’ils achètent à Néotoa, qui est connu comme le loup blanc, c’est en VEFA, donc décennal et dommage-ouvrage. »

 

Le projet s’adresse à des personnes qui n’ont pas forcément des compétences techniques particulières, mais une capacité à consacrer du temps à la construction, de l’ordre de 3 week-ends sur 4 et toutes les vacances pendant 18 mois. Le public visé ne peut pas se permettre de se passer d’un salaire pendant le temps des travaux. Une autre condition est une envie de s’investir sur un projet collectif et solidaire : les 10 maisons se construisent en même temps. Ce critère figure parmi les principaux pour les candidatures. Enfin, il faut tout de même avoir des apports et une capacité d’emprunt, de l’ordre de 500€ sur plusieurs années, pour financer les 135 000€ prévus. Ce budget prévisionnel de 135 000€ par logement repose sur l’autoconstruction, mais aussi sur des subventions, soit de la commune, soit de la défiscalisation, soit des collectivités publiques.

 

« Nous devons mobiliser des partenaires, accompagnement technique, accompagnement pédagogique, assurances, juridique, économique, en impliquant les habitants. On est sur cette posture-là, politique, qui induit un certain nombre de choix. L’un des enjeux était de mobiliser les partenaires, pour travailler la reproductibilité. Il y a un bailleur social, Néotoa, le plus grand bailleur social du département. Ensuite il y a la Ville, la Communauté de communes, le Département, la Région, et la Fondation Macif. Nous proposons à des collectivités de faire une action, et de s’obliger à résoudre des problèmes, et de convaincre par l’exemple. Nous voulons impliquer les politiques publiques dans la démarche, là on est sur la dynamique du lien social, de l’implication citoyenne, le fait d’avoir 10 familles qui font 10 maisons dans une toute petite commune, ça a des implications assez importantes. On est sur un enjeu qui vise la reproductibilité de la démarche. Ce n’est pas de le faire une fois, même si c’est tout à fait légitime de le faire une fois, l’objet c’est de le faire et, de pouvoir le reproduire après, même si ce n’est pas forcément de la même manière. Et ça ça a des implications sur les choix qu’on prend. Notamment, l’inscription dans la politique publique, ça a été inscrit dans le Plan Local de l’Habitat de la communauté de commune où ça se met en place, au titre de l’accession sociale à la propriété, et plus seulement au titre de l’ESS. Ce qui veut dire qu’on mouille les partenaires dans cette démarche-là, parce qu’on ne peut pas prendre tous les risques. L’implication forte de partenaires, collectivité et bailleur social, donc effectivement, le fait de travailler avec un bailleur social, et un bailleur social connu, si on arrive à le montrer, c’est que si on arrive à montre que ça fonctionne, un autre bailleur social ne pourra pas dire après que ce n’est pas possible. Parce que la problématique de l’autoconstruction, c’est qu’on dit toujours que ce n’est pas possible. Et c’est peut-être quelque chose qu’on pourra travailler avec vous, un des enjeux qu’on a c’est d’évaluer et de valoriser cette question, y compris auprès de la Région. »