Résumé des résultats du programme E²=HP² à propos des questions de financement des habitats participatifs

Voir le diaporama de notre présentation lors des Rencontres nationales de l’habitat participatif, Nantes, 6 juillet 2018

Différents leviers pour financer les projets d’habitat participatif

L’habitat participatif peut se financer par différents moyens. Ces moyens ne lui sont pas spécifiques, ce sont ceux de tous types de logement : soit on apporte de la finance ou des emprunts, soit on sollicite des financeurs tiers, soit on fait par soi-même, soit on réduit les coûts.

La particularité de l’habitat participatif est que chacune de ces solutions prend des formes collectives, insérées dans des projets aux objectifs et aux moyens collectifs.
Le propre de l’habitat participatif est en effet de regrouper des logements distincts en une entité commune, avec éventuellement la participation de partenaires tiers (collectivités territoriales, bailleurs…).
D’un coté, ce regroupement ouvre beaucoup de possibles. De l’autre, cela suppose aussi beaucoup de contraintes, qui provoquent des complexifications et obligent à mener des réflexions spécifiques pour trouver des solutions adéquates.

Les différents leviers pour financer les habitats ne sont pas utilisés de façon équivalente selon les projets. En effet, les moyens de financements traduisent dans les faits les objectifs principaux des projets d’habitat. Or, ceux-ci diffèrent selon les groupes. Tous recherchent à réaliser dans leur habitat des formes de solidarités, d’ouverture, de partage, de convivialité, de mieux habiter ensemble, et de cohérence avec leurs valeurs. Mais cela prend différentes formes selon les projets : autogestion collective, mixité sociale et générationnelle, habitat écologique, confort et qualité de l’habitat, volonté de soustraire le bien immobilier du marché spéculatif… Il arrive le plus souvent que plusieurs objectifs soient cités, mais l’expérience (dé)montre qu’il est nécessaire d’établir des priorités pour arriver à arbitrer des choix : on ne peut pas tout réaliser en même temps, ni tout financer. La priorité donnée à certains objectifs limite dans les faits la réalisation d’autres objectifs potentiels.

Une première ligne de démarcation entre les habitats participatifs nous semble se situer entre les groupes qui s’investissent principalement dans le « faire soi-même » (autopromotion, autoconstruction, autogestion) et ceux qui se montent en partenariat avec des bailleurs et collectivités publiques, qui sollicitent ainsi des financements publics. Chacun de ces deux modes de financements mobilisent des engagements différents, à mettre en rapport avec les objectifs et les compétences propres aux groupes d’habitants et leurs éventuels partenaires.

 

L’habitat participatif : une démarche pour mieux habiter, plutôt que pour accéder au logement

Il nous semble important de préciser que la démarche participative (ou « groupée ») ne garantit aucunement une économie financière. En effet, le regroupement des logements permet certaines économies, parmi lesquelles des effets de seuils pour les achats des matériaux, la réduction des surfaces utilitaires telles que les buanderies, et la mise en commun des savoir-faire pour développer l’autoconstruction, l’autopromotion et l’autogestion. Mais ces économies sont largement compensées par des exigences spécifiques aux habitats participatifs. En effet, l’habitat participatif suppose un « mieux habiter », une meilleure appropriation, collective et personnelle, de son habitat. Cela passe, entre autre, par une architecture originale (contrairement à l’architecture sérialisée, qui est le principal moyen d’économie en matière de construction de logement) ; une qualité en matière de confort et/ou d’écologie susceptible de créer l’adhésion des participants autour d’un projet mobilisant ; la création d’espaces communs « en plus » de ce qui est nécessaire pour la simple fonctionnalité des logements (salles communes, ateliers communs, etc.). Chacune de ces exigences a des coûts particuliers et importants.

Cette remarque nous amène à l’idée que l’habitat participaptif n’est pas la démarche la plus indiquée en matière de politique d’accès au logement : il s’agit plutôt d’une démarche de « mieux habiter », de façon collective. Ces deux objectifs ne se contredisent pas nécessairement, mais ils ne sont pas à confondre. Dans les montages opérationnels observés, il apparaît que la poursuite de ces deux objectifs de façon conjointe pose des problèmes spécifiques, dans le contexte actuel de la politique publique française de l’accès au logement pour les ménages aux revenus modestes. En effet, cela suppose de multiplier les partenaires co-engagés (les habitants entre eux, les banques et les assurances, mais aussi les bailleurs sociaux, les collectivités territoriales, etc.), et de multiplier les statuts des habitants dans une idée de mixité sociale (accession à la propriété, location de droit privée, prêt social location-accession (PSLA), prêt locatif à usage social (PLUS)…), ce qui engage autant de plans de financements différents qui se montent pourtant de façon interdépendante pour la faisabilité d’un même projet.

Cette remarque prend sa place dans le contexte actuel de l’habitat participatif : le développement d’un mouvement qui, après la vague de l’habitat groupé autogéré des années 1970 et 1980, renaît depuis la seconde moitié des années 2000 sous une forme plus institutionnelle, en fédérant des groupes d’habitants, mais aussi des accompagnateurs professionnels, des collectivités territoriales, des bailleurs sociaux, une législation (la loi Alur votée en 2014), cela dans un objectif de développement de la démarche auprès d’un public plus nombreux et en particulier de populations aux revenus plus modestes.

 

Les noeuds principaux habituellement rencontrés

Les nœuds principaux spécifiques aux financements des projets d’habitat participatifs semblent être (dans des ordres différents selon les projets, et en plus des problèmes habituels à tout projet d’habitat, tels que le manque d’argent ou de foncier disponible) :
– obtenir des accords d’emprunts auprès des banques,
– financer les espaces communs,
– obtenir des accords de co-engagements auprès des éventuels partenaires financeurs (accords financiers parmi d’autres),
– assurer la période de constitution du groupe, du projet, puis celui des renouvellements d’habitants.

 

E²=HP², janvier 2016